Les mots m’ont échappé un moment, puis doucement me sont revenus. Tout recroquevillés au creux de moi, ils n’attendaient qu’un baiser pour s’éveiller.

Mon silence a eu certains avantages, s’il vous a un moment reposés de mes logorrhées interminables, il a fait également la part belle au recueillement, ce temps où la pensée vagabonde ignore les itinéraires balisés et les raccourcis frustrants.

Les jours se prirent pour des semaines et les semaines pour des siècles. Le ciel avare d’été distribuait sans compter ses larmes de rage sur une saison déjà soldée.

L’automne est à peine installé. Plus cigale que fourmi, j’ai dépensé beaucoup d’énergie à de vains projets, mais quelque chose me dit que le hasard fera bien les choses. J’entraperçois de quoi me sustenter quand l’hiver poindra. J’ai pour une fois la chance qu’on prête aux canailles, un horizon plein de promesses s’étire au loin, j’ai un peu de mal à l’approcher, rusé qu’il est à sans cesse s’éloigner quand je suis sur le point de l’attraper, cependant je crois pouvoir lui chaparder de quoi donner de jolies couleurs à mes perspectives.

Bien des mots maintenant se bousculent, mais je ne veux pour l’instant n’en user que parcimonieusement. Il va me falloir avec soin les choisir et ne vous les infliger qu’avec discernement, bien anticiper les tours qu’ils pourraient me jouer, et ne vous en proposer que de ciselés. C’est un projet sans doute très ambitieux, mais qui ne tente rien n’obtiendra rien, je vais donc de ce pas m’y atteler.

Il y en a qui s’éparpillaient, avec mon filet à papillons je les ai tous rattrapé, le tour était joué ! D’autres, venus de pays étrangers, migraient vers nos contrées. De leur discours je ne comprenais pas un traitre mot, il m’a fallut du temps pour les assimiler, ce sont des mots croisés qui finiront bien par se rapprocher des nôtres. Les vocabulaires jamais ne se figent et ainsi accumulent bien des richesses.

J’ai remisé les mots blessants au fond d’un cagibi dont ils ne ressortiront que pétris de bonnes intentions, ceux trop impétueux seront peut-être un jour apprivoisés, mais je ne peux tout discipliner.

Il me faut savoir ne pas les mâcher pour évoquer ce qui me tient le plus à cœur. Heureusement un peu de complicité me permet de me faire comprendre sans mot dire.

Les réconfortants m’ont été bien utiles ces derniers temps. Je les ai mis de côté pour les offrir à qui désormais en aura plus besoin que moi. J’ai choisi d’en oublier quelques uns, me chatouillent ceux qui me sont restés en travers de la gorge, tandis que d’autres résonnent encore et me font du bien.

Parler à demi mot peut quelquefois suffire. La discrétion impose de n’en souffler aucun à personne, en un mot comme en mille tout est question d’appréciation. j’aime bien ceux qui font rire, mais j’ai un faible pour les mots d’esprit qui sont plus sophistiqués.

Sont un peu agaçants ceux qui me restent sur le bout de la langue. les rechercher prend du temps.

Les gros mots, prennent plus de place que les autres surtout quand ils s’invitent trop fréquemment dans une conversation ; ils n’ont guère droit de cité parmi ceux que j’ai à la bouche, mais ils parviennent parfois à m’échapper quand je suis très énervée.

Du coup, quand je les ai au bord des lèvres, je n’ai d’autre choix que de les manger pour ne pas vous heurter.

Sachez que je n’ai de mémoire pour aucun mot de passe. Quant à vous qui n’en pipez pas un, et m’obligez sans cesse à meubler la conversation, je vous prierais de bien vouloir en inventer, de bien les peser, et de les choisir légers, un reproche ou un compliment perd toute sa valeur dans la lourdeur.

Maintenant il m’importe peu d’avoir le dernier mot, d’ailleurs je vous confie tous ceux que je n’aurai pas dit que vous pourriez mot-a-mot épeler pour vous occuper, pour en faire l’usage qu’il vous plairait, ainsi vous aurez sans doute celui de la fin !

One Reply to “Mot d’absence…”

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