Pour une île…

Ne distinguer d’horizon qu’une fine ligne aussi bleue que l’eau qui la rejoint…

Respirer le vent et sentir les embruns inonder mon visage, laisser ses larmes d’eau salée glisser sur mes joues et mes lèvres goûter la saveur d’une brise méditerranéenne…

Ne plus rien savoir des rivages lointains, oublier même qu’ils puissent ailleurs entamer les flots…

Ignorer ma mémoire ou ne l’interroger que sur ce qui m’est doux, ne penser à rien ou pas grand chose… Si loin de l’humain et si proche d’une Nature qui m’échappe, prendre la juste mesure de mes soucis, tous ici me semblent dérisoires…

Ecouter…

Le claquement d’un drapeau sur quelque gréement, le ronronnement d’un moteur étouffé par le fracas des vagues sur la coque, le silence mugissant des flots…

Sentir…

La houle bercer le navire, le vent contrarier l’avancée, l’air iodé…

Regarder…

L’espace immense, distinguer une crête mousseuse davantage qu’une autre et tenter en vain de la suivre s’éloignant…

A force de patience, discerner au loin comme une trainée sombre, un courant plus violent… Plisser les yeux sous la lumière solaire, douter un instant et finir par le croire… Inaccessibles et sauvages, là-bas un souffle, puis deux les trahissent… Deux baleines,  deux princesses remontées des abysses pour une traversée sans nul Jonas  !… Pour un moment ne plus vivre que pour cette rencontre improbable et ce moment magique… Ne plus pouvoir s’en détacher tant le cadeau est magnifique, vouloir prolonger ce rendez-vous inattendu, espérer y réussir jusqu’à ce que l’apparition se dilue dans l’onde et me laisse orpheline d’un hasard sublime…

Puisque :  » La mer enseigne aux marins des rêves que les ports assassinent ».

De Bernard GIRAUDEAU dans « Les hommes à terre ».

 

 

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