Elle a enjambé le talus herbeux pour d’un saut retrouver la terre durcie d’un sentier, après des jours d’errance à l’ombre des grands arbres, elle retrouvait enfin courage, si elle ne savait pas encore où la mènerait ce chemin pierreux, il témoignait cependant du passage d’autres égarés rassurés d’imaginer paysage moins sauvage un peu plus loin.
La fatigue l’enveloppait comme autant de douleurs diffuses, ses jambes griffées, ses genoux écorchés, la marche l’avait menée sur des pentes escarpées, cent fois elle avait glissé, autant de fois elle s’était redressée. Elle était certaine maintenant de récupérer, indice après indice, un sens de l’orientation fort mis à l’épreuve pendant des semaines, jamais pourtant elle n’avait désespéré.
Ce couloir caillouteux cerné de verdure rendait sa marche encore empruntée, mais la clarté du matin traversé par un fragile rayon de soleil la réconfortait, plus elle avançait plus la pierre devenait gravier, bientôt elle put y prendre fermement appui, et tout devint plus aisé. Après tant d’émotions, d’interrogations, de désarroi, elle se rendait compte que de ce mauvais pas aussi elle avait réussi à se tirer ! La fierté que lui procurait ce sentiment d’avoir gagné une bataille, contre une forêt sombre et hostile mais aussi contre elle-même, en ne se laissant ni impressionner, ni troubler, lui redonnait toute l’énergie qu’elle avait perdu en tournant en rond, les lieux ne sont pas tous hospitaliers, certains prennent un malin plaisir à d’abord vous séduire pour mieux vous dérouter…
A l’orée du petit bois qu’elle venait de traverser, une plaine herbeuse s’étalait, bercée par une brise parfumée de l’odeur des foins fauchés, la lumière inondait l’espace, elle pouvait au loin distinguer un clocher surplombant un paysage apaisé, à qui elle savait pouvoir accorder sa confiance. C’est alors d’un pas assuré qu’en promenade elle a transformé son échappée. Plus rien n’encombrait son esprit, elle était à nouveau sereine, convaincue d’avoir fait le bon choix à la dernière croisée, elle arriverait bientôt, saine et sauve, là où ses décisions, bien à elle, lui correspondaient, là où elle se devait d’aller, « chez elle »...