Louise voit la nuit tomber sur sa ville, ses couleurs s’effacent progressivement pour déposer l’empreinte nostalgique d’une pellicule argentique alentours. C’est l’heure des ombres chinoises derrière les fenêtres éclairées, celle des allumeurs de réverbères, des retardataires qui n’auront pas vu passer la journée, l’heure des retrouvailles ou celle d’une solitude pour un autre soir encore validée.

La pénombre prend possession des lieux en silence, c’est elle qui accélère nos pas et nous rend plus vigilants, l’ombre inquiète alors qu’elle n’est qu’un voile jeté sur un jour finissant. En dessous, rien n’a pourtant changé, mais ne s’alarme t’on pas de tout ce qui nous échappe ?

Louise aime cet intermède qui oblige au retrait, au calme, enfin tout va s’apaiser.

Dans l’obscurité l’imagination, seule à la manœuvre, ne rencontre aucun obstacle pour l’entraver. Alors Louise laisse ses doigts s’emparer du clavier, ou d’un crayon alerte sur une feuille de papier, des mots s’en échappent sans bruit, ils cherchent une place de choix dans l’histoire qu’elle va peut-être raconter.

Un brin de musique sur une lune à peine levée, et la voilà qui se laisse embarquer dans une valse chaloupée. Au début, Louise trébuche car elle ne sait rien faire lentement. Louise est toujours pressée, quand trop d’idées se bousculent sur le seuil de sa page, Louise se laisse troubler par l’une, embobiner par une autre, pour finalement en adopter une tout à fait différente. Par conséquent, le dictionnaire se tient à carreaux, conciliant autant que beau parleur, il sait lui proposer les mots qu’il faut, et quelquefois pistonner ceux qu’elle n’emploie pas assez souvent. Il arrive que Louise n’en retienne pas un, préférant en inventer de plus rigolos. Qui la croit conventionnelle peut être surpris, Louise a l’art de dérouter quand on la pense prévisible. Les mots le savent bien qui d’un clic se retrouvent à nouveau rangés dans l’ordre alphabétique au profit d’autres moins académiques ! Louise se sent bien la nuit quand les distractions devenues invisibles n’entravent plus ses bonnes résolutions, Louise a ce petit côté zéphyrien (oui, Louise trouve cet adjectif plus joli que superficiel ou versatile, son dico en soupire encore) qui la prédestine à de petites fêlures passagères.

Louise aime les mots, surtout ceux qui lui tiennent tête, car Louise a horreur de la facilité. Ce qui peut l’amener à tout compliquer ! Quand Louise se relit, elle trouve qu’elle s’emberlificote souvent dans des phrases trop longues qui font qu’en arrivant au point final, Louise ne sait plus vraiment où elle voulait en venir ! Ce qui pourrait agacer ceux qui la lisent, se sentant brinqueballés et complétement désorientés ! Alors Louise se voit parfois contrainte de s’auto-censurer, ce qui lui déplait forcément, Louise se dit qu’elle vit (encore) en démocratie, que diantre !

Mais la plupart du temps Louise s’autorise digressions, parenthèses et autres broderies. Louise est un panier percé qui sème des mots pour cultiver des phrases et en faire plein de jolis bouquets. Louise a ce côté pépinièriste, enfin, on ne peut quand même pas dire que Louise a vraiment la main verte mais plutôt tachée d’encre…

Et ce soir, le ciel en économie d’énergie a éteint toutes les étoiles d’ordinaire si élégamment accrochées au firmament. Louise aurait bien une idée pour au moins en allumer quelques unes, déjà quelques tirades se profilent au bout de sa plume, mais c’est une autre histoire qu’elle vous racontera une autre fois…

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