Q’un jour à son tour elle aurait un « certain âge »…
Plus jeune, Louise considérait que la vieillesse ne la concernait pas ! Son peu d’anniversaires l’entretenait dans un confort aveugle, une année de plus ou de moi, Louise n’y prêtait vraiment aucune attention. Sa vingtaine flamboyante la persuadait sans difficulté que les dizaines à venir se trouvaient encore à des années lumières de son acte de naissance !
Un matin semblable à tant d’autres, Louise se rendit compte en plongeant dans son rétroviseur, qu’elle avait parcouru un sacré bout de chemin, ce qui impliquait que celui qui lui restait possiblement à faire s’annonçait inexorablement beaucoup plus court… Louise n’en revint pas de ce constat. Pourtant combien de fois déjà avait-elle remarqué, non sans en être fort contrariée, qu’une distance s’était progressivement installée entre l’image qu’elle se faisait d’elle, et celle que les autres se targuaient de mieux discerner !
Si Louise n’avait jamais eu quelque appréhension de vieillir, et pour cause puisqu’elle n’imaginait pas que ce puisse la concerner, ce n’est que récemment qu’elle dû se rendre à l’évidence : elle découvrit qu’elle n’avait plus aucune difficulté à trouver plus jeune qu’elle !
Ceci dit, Louise n’en tira aucune amertume, dans l’ensemble, elle vivait très bien son âge, quoique regrettant le soupçon de légèreté de sa décennie de « sexygénaire ». Elle en conclut que c’était bien dans le regard des autres que s’inscrivait sa date de naissance ! Pourtant Louise vivait comme elle avait toujours vécu, nonobstant les vicissitudes inhérentes à tout un chacun. Louise aimait toujours rire, danser, plaisanter, elle s’activait à mille choses qui, selon la légende, n’étaient plus de son âge ! Louise déplaçait ses meubles, faisait des projets, repeignait son vaisselier, maitrisait de façon experte son ordinateur, sa tablette et son téléphone. Louise n’avait jamais renoncé à se maquiller, ni à entretenir ses mèches blondes.
Si Louise restait depuis quelques années célibataire, c’est que la Faucheuse lui avait successivement pris les deux hommes de sa vie, Louise ne fermait sa porte à aucune opportunité, encore fallait-il qu’elle soit à la hauteur de ceux qu’elle avait perdu. D’ailleurs, n’en déplaise, Louise avait encore son petit succès, mais jusqu’ici elle goutait suffisamment son indépendance, ses nombreux ami(e)s et connaissances pour ne pas chercher à n’importe quel prix de rompre une solitude qu’elle appréciait par ailleurs.
Louise était souvent agacée par un certain laisser-aller générationnel, comme si vieillir impliquait un vestiaire sac à patates, le cheveux terne et les ongles en jachère ! Quant aux hommes qui prêtaient encore attention à leur allure, Louise les comptait sur les doigts d’une main, or Louise a toujours détesté le débraillé.
Bref, Louise, une fois pour toutes, à décidé de ne tenir compte que de son œil affuté, d’ignorer les jugements à l’emporte-pièce, et de continuer à mener la vie dont elle a envie puisque jusqu’ici aucun anniversaire ne semble tenter de l’en empêcher !
Parce que : « La vieillesse ne devient médiocre que lorsqu’elle prend des airs de jeunesse » ça, Louise le sait bien. Louise veut juste être vieille à sa façon !