Écrasé de chaleur le jardin perd ses couleurs, les fleurs ont rendu l’âme aux balcons, l’herbe est aussi rêche qu’un paillasson, les hortensias se ratatinent de soif, les rosiers se déboutonnent, à leurs pieds laissent tomber leurs habits de pétales. Les abeilles ne trouvent qu’à peine pitance, guêpes et frelons échaudés s’en prennent sans merci aux estivants en sueur, les enfants réclament des glaces en chignant, les grands s’échouent tels des baleines sur le premier banc à l’ombre des frondaisons, les grands baissent les volets, les murs épais les gardent au frais, mais les vieux ne s’hydratent jamais assez !
Les stores baissés sur les vitrines surchauffées gardent prisonnier le moindre souffle d’air en goguette, le capot des voitures pourrait faire office de rôtissoire, les canotiers, casquettes et autres couvres-chef rivalisent d’ombrages, les ventilos tournent en rond quand les dames au bord de la pâmoison agitent leurs éventails…
Les chats regardent les chiens étaler leur couenne sur le moindre bout de carrelage resté frais, les oiseaux, le gosier racorni, pour une fois se taisent, les poissons s’étouffent sous les algues vertes pré-cuites, seuls les orvets et autres lézards sont à la fête en ondulant sur les dalles brûlantes.
Le ciel d’un bleu désespérant n’annonce pas le moindre orage qui désaltérerait la verdure réduite à l’état de tapis brosse, salades flétries, tomates exsangues, ciboulette, persil, estragon et autres menthes déjà sèches, le potager n’est plus que cendres, rides et crevasses, les arbres épuisant leurs dernières réserves s’enluminent de moirures, une beauté moribonde s’empare des lieux, des funérailles se préparent à l’ombre des cyprès…
Été 2022.