Quel bonheur que de se glisser dans un lit fraîchement refait ! Je ne vous parle pas d’un lit « baptisé », dont on a rapidement tapoté les oreillers, tiré les draps, pour lui donner un air de respectabilité. Non, je vous conte là la volupté des cotons ou des lins qui fleurent bon la lessive parfumée, qui, encore un peu au garde à vous du fer à repasser, ne demandent qu’à être froissés. Ne voyez là aucune allusion aux ébats qu’un lit peut tolérer (cela ne me regarde pas…) mais ce plaisir d’étrenner une couche requinquée, de goûter la fraicheur de la tiretaine aussitôt tiédie, de s’étirer un peu plus loin pour retrouver encore ce petit toucher frisquet, rien que pour le contentement de l’adoucir une autre fois de plus …

S’ajoute à cette débauche la rondeur des polochons gonflés d’orgueil dans la toile colorée, d’un bleu indigo pour les miens, qui aussitôt pare la chambre d’un badigeon chatoyant et rassurant. La couette, toute rebondie donnerait envie de s’y vautrer encore tout habillé, tant son capitonnage duveteux invite à la sieste ou au chahut. Parfois, je jette par dessus une courtepointe juste pour faire joli, mais en hiver, une épaisseur de laine de plus ne peut nuire.

Ce soir je vais m’endormir dans un lit tout ragaillardi, il sentira bon le linge propre, avec ses plis encore témoins d’avoir eu auparavant une vie bien rangée dans l’armoire, et cette légère fragrance de rose, précieuse à cette nuit qui au matin s’évanouira… Ce petit plaisir ajouté à tous ces petits riens qu’on s’accorde à défaut d’autre chose, quoique modeste, n’a rien a envier à d’autres luxes inaccessibles, « comme on fait son lit on se couche », dit le proverbe… Ainsi peut on « dormir sur ses deux oreilles » plutôt « que d’un seul oeil »…

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