Ce matin l’horizon s’étend devant moi comme un champ immense de possibles, que ferai-je de ces douze mois à venir, sans en gâcher aucun ni les user trop vite ? J’aime ces commencements qui éclairent de projets mes lendemains.
Et eux que feront-ils de moi, pourquoi craindre ce qu’on ne contrôle pas entièrement ? Certains de mes choix inclineront ma destinée, mais bien des aléas m’échapperont, si quelques problèmes devaient survenir, il serait temps alors d’y remédier, il me semble inutile de s’en encombrer avant qu’ils ne soient réellement là.
Aussi, ces premiers jours de Janvier me trouvent-ils sereine, prête à cueillir la rose éclose de chaque matin, qu’importe qu’elle ne dure que l’espace d’une journée puisqu’elle l’aura agréablement parfumée et embellie. Demain arrivera bien assez tôt pour aller en cueillir une autre et rafraichir l’eau du soliflore.
Ce « Nouvel an » recèle en lui de quoi retenir de mieux en mieux la tombée de l’obscurité, chaque jour davantage de lumière et d’heures se proposeront d’apprivoiser tous les petits bonheurs qui passent à notre portée, une nouvelle énergie renait des cendres d’hier pour mieux appréhender tous les jours que comptent une année.
C’est une ribambelle de petits clins d’œil qui saupoudrent de douceur et de beauté notre ordinaire. Il suffit d’ouvrir grand les yeux pour saisir la grâce de l’instant, de tendre l’oreille pour écouter la musique que donne la nature : le craquement des branches sèches dans la forêt, le gargouillis d’une goulotte, le ruissellement de la pluie sur les vitres. Et ce silence ouaté quand tombent les flocons, l’entendez-vous ce souffle muet, ce soupir tout en retenue ? Un rayon doré éclaire la matinée, l’appréciez-vous assez ce ciel d’un bleu si pur pour entamer la journée ? Le gel habille quelques brins d’herbe encore à l’ombre tandis qu’un peu plus loin, la verdure réanime ses couleurs sous la tiédeur. Je respire à pleins poumons la fraîcheur de ce balbutiement de poésie dont la rime va cadencer mon rendez-vous avec ce joli mercredi.
Les corneilles piaillent dans les sapins d’à côté, elles se querellent pour un nid de brindilles ou quelque menu fretin du marais voisin. Des chiens aboient au loin, pas le moindre zéphyr, tout n’est que flaques et ruisseaux, pas un chat n’a mis un coussinet dehors. Rien ni personne ne semble vouloir faire le premier pas pour entamer cette année toute neuve ! La Nature se complait à lambiner, tandis que l’Horloge, qui n’a que faire d’une telle mauvaise volonté, continue inlassablement à engrener les heures.