Rime avec « franche amitié »…

Je suis le ruban d’asphalte qui me ramène aux sources de ma vie d’Avant. Pas si loin de ma Lorraine, suffisamment cependant pour ne partager qu’en pointillés des retrouvailles aussi naturelles que si se quitter datait de la veille, mais sans doute plus précieuses encore parce que plus rares…

Franche-Comté me voici revenue, le coeur battant au rythme des années qui derrière moi m’ont construit tant de jolis souvenirs. Les apparences sont trompeuses, je ne voyage pas seule, mais accompagnées de ceux qui de leur vivant furent aussi les bienvenus chez mes amis… Silencieux et pourtant « bavards », ils évoquent à chaque virage une époque que je ne savais pas encore bénie, la joie d’arriver bientôt efface un instant la nostalgie et la solitude, mais je sais qu’à peine chez eux les ombres du Passé ne me quitteront pas…

Il me faut conjuguer sans faute, Avant-hier, Hier et Aujourd’hui, sans rien regretter ni oublier, porter un regard indulgent sur l’Imparfait, vivre le Présent pleinement et sans amertume, envisager sans crainte le Futur qui s’appuiera sur les coteaux des montagnes russes qui longèrent mon chemin escarpé jusqu’ici.

L’amitié de longue date, celle qui l’empruntât fidèlement et patiemment à mes côtés, me soulageant souvent de mes bagages quand ils pesaient trop lourds, celle qui sans un mot échangé comprenait, ou mieux encore, parfois sans tout comprendre, ni ne me jugeait, ni ne me condamnait, cette richesse là ne fond pas comme neige au soleil, elle est patiemment à l’écoute de mes silences, dessine des sourires sous mes larmes, invente des mots pour l’indicible, et fait de chacun nos revoirs un puits d’amour et d’énergie où je puise à l’envi pour mes jours de disette…

Le temps passe vite quand on s’aime sans fioritures, vient le moment de se dire à bientôt sans fixer de date puisque nous nous savons là les uns pour les autres, que nos clefs sont toujours sur nos portes et qu’il nous suffit de les tourner à peine arrivés sans avoir besoin de crier s’annoncer.

L’asphalte alors se teinte de nouveaux souvenirs qui en ravivent d’autres plus anciens. L’écho de nos efforts à vouloir refaire le monde, de nos tristesses à ne pouvoir réécrire l’Histoire, de nos capacités à rire de nous-mêmes et de nos illusions, tout cela à chaque fois tisse d’un coton plus épais les liens qui ne finiront jamais de nous unir.

A mes amis précieux, Marie-Claire et Martine, Alain et Jean-Yves.

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