C’est un après-midi comme les autres, qui s’étire avant de disparaitre dans la nuit qui s’effondre et le recouvre avant même qu’il ne soit complétement écoulé. Tout disparait dans le noir, quelques silhouettes parfois, apparaissent comme des ombres fantomatiques en passant sous les réverbères… Le halo de lumière ne s’éparpille guère, il faut faire quelques pas à l’aveugle pour retrouver ses repères. Le silence se fait dense présence, même si au loin, persistent encore quelques réminiscences d’une journée bien remplie.
Ma maison est une ile au milieu de cette obscurité. Ce qui n’était que simplicité devient mystère, les choses sont encore davantage immobiles et pourtant, qui sait si, à peine aurais-je le dos tourné, elles ne prendraient vie dans les ténèbres de la nuit ?… Je prête aisément une âme aux objets, je les imagine enfin se dégourdir quand je ne suis plus éveillée, peut-être s’animent-ils et reprennent -ils quelques forces pour dès potron-minet respecter cette immobilité imposée toute la journée. Quand mes nuits restent blanches, je ne me relève que rarement, les déranger me contristerait, alors je me contente de rester aux aguets du moindre petit bruit qui me confirmerait leurs activités de noctambules… Je soupçonne mes tables de tourner autour du pot, mes chaises de se croire musicales, les escaliers de soupirer, je suis presque certaine d’avoir entendu les robinets pleurer, et les meubles en bois échanger forces craquelures… N’avez-vous vraiment jamais entendu votre clavier pianoter ?… Et les portes grincer ?… Et ces courants d’air quand tout est fermé ?… Je ne vous crois pas, chez vous n’est pas autrement fait que chez moi…
Sous mon édredon je ne fais pas la fière, la nuit je ne suis ici tolérée qu’à condition de ne pas empiéter sur cet univers clandestin qui pour quelques heures au moins laisse toute liberté à la matière.
Je ne vous en dirai pas davantage, les secrets que j’ai réussi à percer ne doivent jamais être dévoilés, je ne suis que de passage, la maison consent à m’abriter, d’autres avant moi auront eu cette chance, ceux qui me succéderont devront continuer à être discrets, les murs ont une mémoire qu’il faut tout autant craindre que respecter, d’où l’homme tient-il qu’il est le seul à être au coeur de la Conscience ?…
🙂 🙂