Pourquoi fait-il soleil quand j’ai tant de peine ?…
Combien encore de ces dimanches de veillée ?… De ces montagnes russes d’espoirs insensés aux abîmes de désespoir ?…
Qui a dit qu’il fallait mesurer ses chagrins ?… N’y a t’il de deuil acceptable qu’humain ?… Je me fous de ce qui serait « raisonnable » ! « IL » s’en va… A tout petit feu, comme pour ne pas déranger, sans fracas, sans drame ni gémissements, il s’en va doucement, en prenant soin de me préparer à cette nouvelle détresse…
Chaque jour il abandonne un peu de lui pour me convaincre qu’il est l’Heure… L’amour est aveugle qui ne veut jamais renoncer, toujours s’accrocher au moindre sursaut, encore un jour s’il vous plait, un soir, une heure, je vous en prie, je veux encore l’embrasser et lui dire que je l’aime, et combien je lui dois de « merci »…
Dites moi donc, vous qui n’avez toujours pas compris qu’aimer n’est pas un don réservé aux humains qui souvent en font mauvais usage, ou qui, pour un oui, pour un non, tournent casaque et vont aimer ailleurs ou autrement… Les refuges témoignent de vos inconstances criminelles, tandis qu’eux, fidèles, ne comprennent pas et subissent cette injuste et ignoble solitude…
Tu dors… Au milieu de tes oreillers, dans l’obscurité de notre chambre, comme pour t’habituer à cette nuit infinie qu’est la mort, à moins que… Même vous, même toi, qu’un ailleurs puisse t’attendre…
Je te porte de ta couche à ta gamelle, tu ne manges plus ou si peu, tu ne me vois plus, ni ne m’entends plus, ou à peine, mais nous nous comprenons, c’est une fusion de tendresse, la nuit je ne dors plus, je veille, avant que tu ne m’appelles, je sais… Un câlin t’apaise, et je peux moi aussi, te sachant tranquille, me rendormir un moment.
Est-une vie de chien que cette descente aux enfers ? C’est encore une vie, comme celle de nos anciens qui n’attendent plus rien mais respirent encore un nouveau matin… Qu’importe mon chagrin, qu’importe ma fatigue, demain peut-être tu t’en iras, et je ne saurai plus quoi faire de moi….
Tu dors… Comme si ce sommeil n’était qu’un brouillon de mort, comme si pour durer encore un instant, toi aussi tu te mettais en veille… Et moi je suis là à te regarder partir, a t’offrir mes ultimes caresses, toi, tu soupires d’aise, jusqu’au bout ce bonheur de nous aimer…
Qui vient de demander : « Mais de qui parle t’elle? »
Je parle de Viktor. C’est mon petit chien, mon shi-tsu d’amour, ma boule de poils toute de tendresse et de courage, il s’en va, comme toutes celles et ceux qui avant lui m’ont laissée orpheline, peu importe qui sont celles et ceux qui m’ont ainsi quittée pour d’autres contrées inconnues, l’absence des êtres qu’on aime ne se range dans aucun tiroir. Viktor s’en va, et mon désespoir ne fait de tort à aucunes des douleurs qui ont jalonnées ma vie, alors oui, je pleure, je sanglote, parce que c’est Lui, et Parce que c’est Moi…
A Viktor…