Ils s’aiment.
Du verbe aimer, ou partager, si vous voulez.
Ils ont l’un pour l’autre les attentions les plus touchantes. Des gestes tendres, des mots pleins de douceur, une inquiétude au bord des yeux dès qu’il s’agit du bien-être de l’autre.
Ils s’amusent d’un rien, éclatent de rire et refont le monde certains soirs jusqu’à des points d’heure.
Ils ont leur chanson fétiche, leur porte-bonheur, l’anniversaire de leur rencontre… Ils leur arrivent de s’agacer des manies de l’un tandis qu’ils ont la patience d’un ange aux caprices de l’autre…
Ils s’aiment et leurs regards se croisent sans qu’ils n’aient forcément besoin de se parler pour se confimer ce à quoi ils pensaient.
Ils ont restauré une maison. Au bord d’un champ, tout près d’un lac où nichent des milliers d’oiseaux. Ils ont bon goût, leur nid est un petit havre de paix où j’aime à l’occasion m’arrêter. Quand il fait beau ils déjeunent sur la terrasse en bois qui prolonge leur véranda.
L’un est bon cuisinier, l’autre est fin gourmet. Il leur arrive de prendre des vacances. La Champagne étant parfois chiche de rayons, ils partent au soleil au pied des montagnes corses, ou plus loin, quand leurs occupations professionnelles leur en laissent le temps.
Leur charmant petit hôtel, est à chaque saison, un repaire d’ornithologues à l’affût du passage des grues cendrées sur le lac, ou, patiemment aux aguets des oiseaux qui nichent au secret des joncs des étangs avoisinants. Ils sont tout sourire pour les clients qui ont le bonheur d’en franchir le seuil, c’est en amis d’ailleurs, que la plupart d’entre eux les quittent, la larme à l’œil et se promettant d’y revenir tant ils se sentent là-bas comme chez eux.
Le restaurant n’a pas d’étoile, mais c’est dans nos assiettes qu’elles brillent de mille saveurs. Plus fins et délicats menus, ça n’existe pas, en tous cas, c’est chez eux que mes papilles sont bien servies ! Comme la gourmandise nous rend parfois coupables, ils louent de jolis vélos qu’on enfourche pour aller pédaler sur la digue, le temps d’oublier nos agapes et de se réjouir de voir bientôt arriver l’heure du dîner…
Ils sont généreux. Quand on est amoureux, le bonheur se partage spontanément, et c’est dans un coin du salon que souvent nos verres pleins de bulles se lèvent à celui d’être devenus des amis.
Après quelques années, ça y’est, c’est décidé, ils vont se marier. Ils veulent un mariage tout simple, entourés de leur famille et de leurs amis les plus proches. Ce sera en Mai, et je ne me serais jamais imaginée me réjouir autant de voir deux tourtereaux convoler…
Même si en d’autres temps ces amours là m’interrogèrent, car ce qui ne nous ressemble pas nourrit nos peurs, même si antan, moi aussi je pus m’affubler d’œillères et que parfois la tentation ou la facilité aidant, l’idée put m’effleurer d’en juger hâtivement et donc injustement…. J’ai depuis fait du chemin, rencontré des gens heureux, des amoureux, et force me fut de constater que ces Amours là existaient aussi, et que les nier ne les faisaient pas disparaitre, mais juste souffrir de ne pas être reconnus comme tels.
J’ai donc déjà en tête les mots que je leurs écrirai : « Soyez heureux tous les deux, chers Thierry et Didier, oubliez les aigris, les étroits d’esprit, les médisants et les jaloux, qui sont-ils donc pour vous juger ?… Qui serions-nous d’affirmer maîtriser ce qui ne peut l’être ? On ne décide pas d’être amoureux, on l’est, c’est tout… L’Amour est universel et s’aime qui veut du mieux qu’il peut… Filez des jours heureux mes chers amis ! »
Et que vienne le jour où il ne sera plus nécessaire de devoir écrire ces lignes pour tenter, hélas encore souvent en vain, de convaincre ou de justifier de nos amours qu’ils soient hétéro ou homosexuels, alors qu’ils sont avant tout, AMOUR, tout simplement…
– A Didier,Thierry, Pascal, Élisabeth, Denis, Emmanuelle, Laurent ou Rebecca, et tant d’autres qui ne sont ni meilleurs, ni pires que nous tous qui n’avons pas les mêmes inclinations… Le monde s’enrichit de TOUTES les différences tant qu’elles ne causent de blessures à personne et n’attentent ni à nos droits, ni à nos libertés…