Bon, cette fois-ci ce serait bien le Diable (oups…) si on ne recevait pas un signe, même un tout petit, un clin d’oeil nous suffirait…

Mais rien.

Depuis des lustres qu’on se pose tous la question, y’a t’il un « Après » ?… Un « Après la Mort », évidemment…

Quand mes grands-parents ont disparus, j’étais à chaque fois assez âgée pour en attendre un petit quelque chose qui m’engagerait à les croire simplement éloignés, invisibles, mais avec cette réconfortante certitude de pouvoir continuer à deviser avec eux.

Notre complicité m’incitait à envisager qu’ils ne puissent quand même pas me laisser tomber du jour au lendemain, avec tout ce chagrin, sans essayer de me consoler en me laissant entrevoir que peut-être ils pouvaient être ailleurs, peut-être mieux qu’ici-bas (il y avait déjà cette idée d’un ailleurs « Supérieur » à l’étage au-dessus, au Ciel, quoi !) Je n’ai pas été éduquée chez les bonnes soeurs pour rien !…

Mais tous quatre, depuis quarante ans et davantage se taisent éternellement.

Puis les années passant, il arriva qu’une ou deux copines de classe passent de vie à trépas, souvent de façons brutales et accidentelles, et là encore, quoique pas forcément amies intimes, je me disais qu’une telle expérience devait se partager, quoi, on était quand même du même âge !…

Mais là encore, rien !…

A croire que tous autant qu’ils étaient ces « trop tôt disparus » se vengeaient d’avoir dû partir avant nous en nous laissant dans cette expectative angoissante à chaque trépas : A qui le tour, et quand ? Où donc êtes-vous passés, nous entendez-vous seulement ? Nous voyez-vous ?… Ma paranoïa juvénile me poursuit parfois encore, quand je me surprend à me dire : « Maintenant « ils » savent tout, je ne peux plus rien leur cacher !!!!… »

Les années s’accumulant à mon compteur, et pour le coup, force est de m’en réjouir, quelques amis ont du eux aussi s’en aller. Dernièrement, notamment, un vieux copain très rigolo, toujours une blague en réserve, le genre « gentille grande gueule », pas toujours discret. Là, pleine d’espoir, je me suis dit, « si celui-ci ne parle pas, il n’y aura plus grand chose à espérer… Si quelqu’un peut nous cracher le morceau, c’est lui ! Il ne pourra pas s’empêcher de tout nous raconter… »

Que nenni ! Rien !

Lui vivant si prolixe, toujours prêt à donner son avis, même quand on ne lui avait pas vraiment demandé, ben, là, silence radio ! Rien, pas la moindre allusion, pas la plus  petite blaguounette pour nous rassurer, rien vous dis-je !

Alors, j’ai commencé à remiser mon catéchisme et mes illusions au grenier de mon âme… Si personne, même les bavards impénitents ne lâchent rien… C’est peut-être qu’il n’y a rien à dire, qu’ils sont définitivement aux abonnés absents et sans doute « inexistants » donc dans l’impossibilité de nous informer de quoique ce soit, ni, forcément, du Néant !…

Quelle sombre perspective, de quelle incroyable utopie nous a t’on farci le crâne ! Mais quelle duperie que cette histoire d’Enfer ou de Paradis !… Pourquoi voulons-nous à tout prix qu’il y ait une suite à notre existence « terrestre » ?… Les feuilletons ont toujours eu  la côte, on aime le suspens, attendre la suite et enfin découvrir et résoudre l’énigme… Sauf qu’ici le premier épisode a des longueurs, et que le second reste encore à écrire…

Cependant, que voulez-vous, je ne me résigne pas , rien en moi n’est raisonnable, l’espérance fait tellement partie de moi… Et tous ces farceurs, ils me manquent tant, qu’en désespoir de cause, je me suis simplement convaincue qu’ils devaient être réduits au silence, un contrat qu’ils auraient signé, peut-être, à la porte de cet Ailleurs qui nous interroge depuis la nuit des Temps ?… Ils ont dû promettre de ne rien dire, ce serait trop facile, hein, si on savait tout, on vivrait pas pareil, on y perdrait ce peu de moralité qui nous reste à se persuader que la Vie Eternelle ça se mérite… ça doit être ça, la raison de ce silence égoïste…

Et pis, je ne le dis qu’à vous, sachez le garder pour vous et ne point en douter, mais il m’est arrivé quelquefois de distinguer quelques signes curieux, quelques musiques inopinées attachées à un souvenir précis, quelques « rêves » fugitifs dont on émerge sans vraiment savoir si l’on dormait ou si l’on n’avait pas, par hasard, franchi quelque porte dérobée… J’ai cru entendre… J’ai cru sentir un courant d’air dans une pièce fermée, j’ai cru deviner une présence sans en être inquiétée, j’ai vu la montre de mon grand-père se remettre à marcher quand un soir je l’avais supplié de m’encourager et de me confirmer qu’il veillait sur moi de tout là-bas…

Alors, ne jouons pas à ceux à qui « on ne la fait pas »… On dit que l’espoir fait vivre ?… Et bien moi j’aime la vie, dans un petit coin de mon coeur, je continue à rêver que tous ceux qu’on a aimé ne sont ni complètement, ni définitivement partis, qu’il faut juste les laisser « vivre leur vie d’Après » sans trop les déranger, car accepter le Néant reviendrait à ce constat navrant : Tout ça pour ça ?!….

 

 

 

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