Des années…

Que la maison somnole sous l’Embata…

Meublée sans élégance d’un mobilier disparate, volets baissés sur des fenêtres aux rideaux défraîchis.

A peine un habitant provisoire tourne t’il la clef dans la serrure en refermant la porte derrière lui qu’aussitôt s’installe une fraîcheur humide qui lentement deviendra hivernale même sous la canicule basque.

Les crémones des fenêtres  rechignent à pivoter, les châssis en bois tout courbatus s’ouvrent péniblement, les persiennes s’écartent enfin en grinçant. La douceur de Mai s’engouffre aussitôt dans la place tandis qu’un vantail se rabat sous le vent chaud, la maison cligne des yeux.

Le robinet en gouttant a laissé sur l’évier une trace cuivrée, les casseroles s’ennuient depuis des lustres à leurs crochets, la cuisine laisse trainer partout une odeur de renfermé.

Les voilages se soulèvent en dansant sous le courant d’air, la maison respire à plein poumons et s’éveille au printemps. Le balcon nous promet la plage et l’horizon n’est bientôt plus que ciel et mer. Les valises qu’on monte dans les chambres aux papiers peints fleuris, les paniers qu’on pose dans la véranda, les pulls qu’on jette sur le canapé. La maison lentement se laisse apprivoiser.

Des années que je n’en n’avais pas franchi le seuil. L’émotion et les souvenirs me submergent. Je savais bien que revenir ne serait pas facile. Où donc êtes-vous passés ? Je ne vous trouve nulle part ou bien je vous devine partout. A quoi bon vous appeler, seul le silence me répondra. Amédée… Une photo sur le buffet, sur l’étagère là-haut ton béret, une makila oubliée. En bas de la rue, une tombe sur toi refermée. Et loin, très loin des Pyrénées, de la Rhune et de l’océan, Andrée, à jamais égarée sur les cendres de son existence, trottinant dans les couloirs d’une maison de vieillesses sans souvenirs, heureuse d’un présent qui n’a plus de mémoire.

Je déambule de pièces en souvenances, l’ombre nostalgique du passé le dispute à la lumière radieuse du présent, la maison m’enlace et me console d’une senteur familière, je suis presque chez moi, comme rentrée d’un trop long voyage…

Tendrement pour Amédée et Marraine. (1er Mai – 07 Mai 2011)

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