Depuis des mois les mots m’échappent… Ils sont si nombreux à se bousculer à longueur de journée que je ne peux en saisir aucun, la nuit, la sarabande se calme, et ils s’alignent sagement, se donnent la main en phrases élégantes et disciplinées… Au petit matin il n’en reste plus grand chose, un souvenir brumeux qu’aucune plume ni clavier ne réussissent à remettre en ordre, ils sont devenus des éclats de lettres dissonants et parfois difficiles à lire ou à entendre…

Les mots me poursuivent sans relâche, les plus douloureux sont souvent les seuls à me rattraper tandis que de plus réconfortants ont été par les précédents impitoyablement piétinés… Je me promets chaque nuit d’en apprivoiser quelques uns, je crois connaitre par cœur leurs envolées, en avoir déniché d’excellents qu’au petit matin j’emprisonnerai sur le papier, mais évidemment, au premières lueurs du jour, ils se sont volatilisés, n’en reste qu’un écho désolé impossible à retenir…

Si je leur prêtais un pouvoir fascinant, si je les connaissais capables du meilleur comme du pire, pour autant je ne les savais pas à ce point désarçonnants, fuyants et inconstants. Peut-être épuisés par le poids d’une nouvelle inquiétude qu’une fois encore je leur demande de m’aider à porter ?… Sans doute lassés de m’avoir déjà trop souvent soulagée ?… Ils ont toutes les raisons du monde de chercher à m’éviter, et je ne sais plus auxquels d’entre eux me vouer, ni comment leur réclamer encore un peu de patience et d’indulgence, ils sont tellement généreux parfois que j’ai du par mégarde maladroitement en abuser… Alors, des mois durant j’ai tenté de ne point les importuner davantage, j’avais remisé mon clavier, mes crayons, conservé sur le papier ceux qui avaient bien voulu rester, c’est qu’ils sont si précieux ceux qui ne vous tournent pas le dos quand vous avez n’allez pas bien…

Et voilà que ce matin, j’ai pu doucement les approcher, cette nuit je m’étais promis de ne plus reculer, de trouver l’audace d’aller les dénicher là où ils se cachaient, je les ai enfin retrouvés, certains sont revenus à moi comme s’ils ne m’avaient jamais délaissée, d’autres se sont fait un peu prier… Il y en a encore quelques uns qui s’écartent de mon chemin, prudents, ils restent à distance de mes chagrins, il faut les comprendre, car c’est souvent aux mêmes qu’on demande de l’aide…

Je leur ai expliqué ma détresse sans eux, je leur ai avoué à quel point ils m’étaient irremplaçables, on ne dit jamais assez à ceux qu’on aime à quel point on tient à eux, c’est quand ils ne sont plus là qu’un regrette d’avoir été si discret…

 

 

 

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