Je  ne sais si le silence, en s’installant dans des lieux inhabituellement déserts,  favorise la perception de ce qu’ils nous révèlent…

Dans le collège les  pièces sont dessinées comme des eaux fortes, les traits sont précis, comme les piles de dossiers au garde à vous sur les bureaux et les chaises retournées sur les tables. Plus rien n’est flou.

Le ménage a été fait, rien ne traine par terre ni ne dépasse des étagères. Chaque chose est à sa place, elles restent figées là où on les a posées avant de les abandonner à leur immobilité. Le silence les étoffe, leur accordant davantage d’ importance. Des trimestres de labeur ou d’ennui soulignent le plafond d’un voile de grisaille, exagérant la fadeur de la peinture des murs. Les lambris de bois sombres qui tapissent les cloisons, les porte-manteaux où parfois restent encore suspendus des gilets ou des foulards oubliés, les casiers sans courriers ni copies à corriger, chaque objet, chaque endroit semble se réapproprier les lieux et y retrouver son identité. Le photocopieur ronronne au fond de la salle des professeurs, aucun gobelet de plastique n’encombre la machine à café, les écrans sont éteints et les claviers muets. La sonnerie aigrelette du téléphone résonne dans le hall et va se perdre dans des couloirs désertés.

Quand tout s’agitait mon regard  survolait les choses sans jamais prendre le temps de se poser. Le bruit rétrécit l’espace, le silence lui rend son âme.

Autant d’endroits que de silences…

Dans la pénombre de la basilique, le silence embaume la cire et l’encens. Echappée d’un entour assourdissant, j’ai à peine franchi le portail que le calme qui en drape l’architecture m’enlace de sa fraîcheur. C’ est un apaisement. Je ne saurais dire si quelque Dieu y accepte l’hospitalité du sanctuaire qu’au Moyen-Age pierre à pierre on a pu lui construire, mais s’il fallait le nommer, Harpocrate ou Horus feraient bien l’affaire. Le mutisme des murs n’est qu’apparence, un murmure d’orgue m’emboîte le pas, mon regard alors s’attache aux chapiteaux sculptés, les creux et déliés de la pierre me disent un passé encombré de gamins aux aubes trop empesées, de sermons puritains et de chagrins autour de cerceuils de sapin… La lumière se fait discrète, se déversant timidement d’un vitrail dormant pris au piège d’une résille de plomb, pour aussitôt s’abîmer dans l’ombre des murailles. Le rideau cardinal du confessionnal ne receuille plus que des aveux de poussière… Plus loin on a gravé dans la pierre le noms de pieuses chanoinesses qui reposent dans la crypte comme une dernière renonciation. Quelques pièces dégringolent dans le tronc paroissial et des cierges s’allument en guise de prière…

Je ne sais si les murs se souviennent ou si nos émotions parlent pour eux, mais presque tous me parlent quand le silence les habille d’intimes et secrètes souvenances …

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *